Submitted by Lisa Graves on
Wendell Potter is featured in this week's Le Monde for his work on behalf of the Center for Media and Democracy. It's in French, of course, and in the article he talks about the influence of the insurance industry lobbyists on elected politicians and candidates. I'd translate it for you, but even as a former tutor in French the verb tenses still elude me. However, for those of you who are fluent in the language of love, here is the feature:
Wendell Potter, consultant, mais aussi expert au Centre pour les médias et la démocratie
"Ce lobby ne désarmera pas"
LE MONDE | 23.11.09 | 15h18
PHILADELPHIE (PENNSYLVANIE) ENVOYÉ SPÉCIAL - Consultant, mais aussi expert au Centre pour les médias et la démocratie, Wendell Potter est un farouche critique du système de santé américain. Il en connaît tous les rouages : pendant quinze ans, il a travaillé à la communication de Cigna, une des premières sociétés privées américaines d'assurance-santé.
Sa vie a basculé en deux temps. D'abord lorsque, en 2007, il a rendu visite à son père, au Tennessee. Il a assisté à une distribution gratuite de soins à des non-assurés par des médecins volontaires. "La queue était interminable. Des gens avaient passé la nuit dans leur véhicule avec leurs mômes pour être sûrs d'être soignés. Je me suis dit : c'est ça, être malade en Amérique ?" Ensuite, lorsqu'est sorti Sicko, le film de Michael Moore, Cigna lui a demandé - c'était son rôle - de préparer un contre-argumentaire. "Je suis sorti de la salle en pensant : qu'est-ce que je vais pouvoir raconter pour discréditer ce film ? En gros, ce que montrait Moore était exact. J'étais bien placé pour le savoir." Assez vite, la foi du converti et un blog où M. Potter disait ce qu'il pensait de l'état de la santé dans son pays ont poussé Cigna à le convier à quitter l'entreprise.
C'est à deux pas du gratte-ciel qui abrite Cigna, à Philadelphie, qu'il nous reçoit. Wendell Potter montre l'immeuble de son ancien employeur : "J'étais au 40e étage, juste sous la direction générale. Quand on travaille en entreprise, surtout à un échelon supérieur, on s'y identifie. On ne peut pas imaginer que son credo ne soit qu'un cache-sexe."
Le 15 septembre 2009, il a témoigné devant la commission de la gouvernance politique de la Chambre des représentants. Il y a évoqué une première puissance mondiale classée 27e pour la mortalité infantile et 28e pour l'espérance de vie ; et, surtout, une assurance-santé privée pour qui "le profit passe avant le bien-être des patients". Le Monde l'a interrogé sur les lobbyistes.
Comment fonctionne le lobby de l'assurance-santé privée et quelle est son influence?
Il est financé par ses membres, principalement des grands assureurs-santé, pour défendre leurs intérêts collectifs. Ses stratèges travaillent sur la manière de peser sur les décisions du Congrès, ses communicants sur la façon d'influencer l'opinion publique. Ce lobby, profondément enraciné à Washington, est extrêmement puissant dans les coulisses du Congrès. Mais son problème récurrent est d'être peu populaire. C'est pourquoi, souvent, il n'agit pas au grand jour : plus que d'autres, il a besoin d'organisations qui relaient son point de vue sans lien apparent avec lui.
La Chambre de commerce américaine en est un parfait exemple. C'est un groupe patronal politisé, très à droite, mais dont l'intitulé laisse croire qu'il est un simple syndicat. De même, la National Federation of Independent Business, son équivalent chez les PME, se dit "sans parti pris". Or l'objectif premier de ces groupes est de lutter contre toute obligation des employeurs de fournir une couverture-santé à leurs salariés.
Comment le lobby des assureur- santé procède-t-il?
Pour imposer sa volonté au législateur et influencer l'opinion, il met en oeuvre des méthodes très élaborées. Par exemple, un sondage vous est présenté comme "indépendant". Or il a été entièrement financé en sous-main par le lobby dans le but de parvenir aux conclusions qu'il souhaite voir "indépendamment" énoncées.
Surtout, le lobby rémunère des candidats dont ses membres, une fois élus, attendent un retour d'ascenseur. Souvent, les contributions passent par des donateurs privés que le lobby sollicite. Dès qu'il a commencé de craindre l'accession d'un président démocrate, le lobby des assureurs-santé a beaucoup oeuvré à faire élire des démocrates "Blue Dogs" (conservateurs en économie, opposés à une assurance-santé publique). Enfin, il "tient" les politiciens qu'il fait élire. La principale conseillère de Max Baucus, son homme-clé au Sénat (président de la commission des finances), se nomme Liz Fawler. Avant, elle était lobbyiste de WellPoint, le leader américain de l'assurance-maladie privée.
Et si un politicien vote à l'encontre du voeu du lobby?
Celui-ci peut détruire sa carrière. Il va le délégitimer, financer contre lui un autre candidat. C'est difficile à croire, mais les choses se passent ainsi. Ceux que le lobby aide à être élus sont très conscients de son pouvoir de nuisance. L'assurance-santé privée a dépensé ces six derniers mois 340 millions de dollars pour défendre ses clients. Pour chaque élu au Congrès s'activent six de ses lobbyistes.
Qui sont-ils?
Essentiellement des juristes et d'ex-politiciens. Les anciens membres du Congrès et leurs conseillers sont très recherchés pour leur carnet d'adresses. Cigna avait embauché pour diriger son bureau de Washington l'ex-directeur de cabinet du chef de la majorité, alors républicaine, au Sénat.
D'où vient cette intrication entre lobbyistes et certains politiques?
Depuis trente ans, un trident s'est installé entre certains secteurs d'activité, les lobbies et des groupes de réflexion ultraconservateurs, dont l'assurance-santé privée offre l'exemple type. Ils ont imposé un mode de pensée qui a vacillé avec la crise économique, mais reste très puissant.
Bien avant la victoire de Barack Obama, ils se sont préparés à parer la menace d'une assurance-santé publique concurrente. Les campagnes pour répandre des rumeurs fausses ou délirantes, sur, par exemple, les "escouades de la mort" d'Obama pour éliminer physiquement les vieillards ou les jeunes filles que l'Etat fédéral obligerait d'avorter en cas d'adoption de cette loi, viennent de ces réseaux.
Quand Sarah Palin ou Michèle Bachmann (représentante du Minnesota) lancent ces idées folles, ou lorsqu'un politicien déclare que l'assurance-maladie universelle c'est "le socialisme", je sais par expérience que ces arguments ont été pensés et testés avant d'être lancés.
La réforme-santé prônée par Barack Obama bénéficie, avec des nuances, du soutien de l'opinion, d'une majorité du corps médical et de l'industrie pharmaceutique. Or l'assurance-santé privée semble en mesure d'empêcher son adoption ou de vider la réforme de son contenu. Qu'est-ce qui rend ce lobby si puissant ?
Il est bien organisé et sait attendre le bon moment pour faire appel à ceux qu'il a aidés. Il trouve des relais efficaces pour expliquer au public combien les assureurs privés se soucient de son bien-être, alors qu'ils ne pensent qu'à accroître leurs bénéfices, ceux de leurs actionnaires et les émoluments de leurs dirigeants.
Ses responsables savent utiliser des propensions ancrées dans les consciences américaines pour façonner le langage : ne pas dire assurance publique mais "assurance socialisée", par exemple. Ils savent que le terme "socialisme" génère un rejet de l'opinion. Surtout, ils tirent leur force du bouleversement qu'a connu leur environnement en trente ans.
Quel bouleversement?
Jusqu'aux années 1970, la couverture médicale aux Etats-Unis était amplement gérée par des réseaux à but non lucratif comme BlueCross BlueShield. Avec l'accession à la présidence de Ronald Reagan (en 1981), une succession de fusions-acquisitions a laminé les assurances non lucratives partout en Amérique. A la fin s'est formé un "cartel" de sept grands assureurs privés.
Lorsque le lobby clame qu'une assurance publique constituerait une "concurrence déloyale", il sait de quoi il parle : dans certains Etats, un seul assureur domine le marché local, fixant sans concurrence les conditions d'accès aux soins et de leur remboursement ! Avant mes quinze années chez Cigna, j'ai passé quatre ans chez Humana. Quel beau nom pour une entreprise... Ils sont devenus si puissants qu'ils contrôlent près d'un tiers de la couverture-maladie des Américains. La plupart du temps, ils décident seuls combien un médecin et une journée d'hôpital seront payés. Etonnez-vous que durant la récession ces sociétés soient restées si profitables !
Le débat va débuter au Sénat américain. Quel en sera l'enjeu essentiel?
Le lobby ne désarmera pas. Il va redoubler d'efforts pour tuer ou affaiblir le plus possible l'inscription d'une "assurance publique" dans la loi. S'ils voient qu'elle sera adoptée, ils feront tout pour dépouiller l'option publique de son intérêt. Ils chercheront à obtenir que les Etats puissent décider chacun séparément de s'y soustraire, pour pouvoir, ensuite, faire pression en ce sens à l'intérieur de chaque Etat. Quelle que soit la loi adoptée, il faudra qu'elle ne constitue qu'un début. Il y aura encore tant à faire à l'avenir pour mieux couvrir les besoins sanitaires des Américains et réduire le coût général de la santé.
Comments
Wendy Fleet replied on Permalink
Translated using babelfish
Scalar replied on Permalink
Thanks for the tip
Jean-Claude Delarue replied on Permalink
Wendell Potter
H. Seiler replied on Permalink
Wendell Potter in Le Monde
Anonymous replied on Permalink
zero moral
Libre replied on Permalink
Une vrai révolution
mutuelle replied on Permalink
mutuelle